« Ecrivain public », Un métier bien résistant à la poste de Bamako

Article : « Ecrivain public »,  Un métier bien résistant à la poste de Bamako
Crédit:
9 janvier 2012

« Ecrivain public », Un métier bien résistant à la poste de Bamako

Il n’y a pas de sot métier, mais il y de sottes gens. Cette sagesse trouve tout son sens chez la dizaine « d’écrivains publics » qui occupent l’esplanade de la grande poste de Bamako. S’intéressant à toutes les activités afférentes à la rédaction et à la mise en forme des correspondances et autres demandes administratives, ce corps de métier se maintient en dépit de la percée des technologies de l’information et de la communication.

Au bas du perron de la grande poste de la capitale malienne, des bancs et tabourets sont rangés à côté d’une muraille.  C’est le siège, en plein air, des écrivains publics. Parmi eux, Joseph Batantou, Congolais de Brazzaville. Il écrit des renseignements, en gros et avec calligraphie, sur une enveloppe sous l’œil attentionné de son porteur. « Je suis entrain de réécrire des adresses pour un client. Il est allé au guichet pour affranchir la lettre, mais on lui à fait remarquer que les références ne sont pas bien mentionnées», lâche-t-il.

Ici, les activités vont de la rédaction de la  lettre ordinaire à la conception des demandes administratives complexes en passant par le remplissage des cardes de vœux. « Nous faisons beaucoup de demandes à la veille des concours, que ça soit la fonction publique, la police, ou la gendarmerie. Mêmes les étudiants viennent solliciter notre service. Nous recevons également des clients pour des plaintes judiciaires» nous confie-t-il. Et d’ajouter « C’est la seule activité que je mène et toutes mes dépenses y sont liées depuis que j’ai débarqué au Mali il  y a quinze ans ».

A quelques mètres de lui son collègue malien, Adama Guindo, 64 ans guette d’éventuels clients. Il nous informe que ce métier était jadis l’apanage de personnes retraitées ou d’un certain âge, mais qu’il est  de plus en plus exercé par les jeunes diplômés. Fait notable, précise-t-il, l’activité ne se porte pas bien, Internet et les nouveaux moyens de communication sont passés par là.

La bonne demi-heure de notre passage sur les lieux a été très pauvre en client. Ce qui confirme l’hypothèse du sexagénaire. Mais, il n’est pas question d’entrevoir la mort prochaine du métier. C’est la conviction de Joseph qui se veut rassurant : « Même si des outils comme Internet et le téléphone portable commencent à tout changer, la poste demeurera. Elle fait d’autres activités comme l’envoi des colis. Et le métier d’écrivain public survivra tant que la poste vivra ».

Les autorités municipales tentent de réglementer le secteur en exigeant  une autorisation d’exercer. Cette procédure qui demande souvent une enquête de moralité sur l’ « écrivain »  n’est pas suivie par tous. Ce qui fait que présentement seul un écrivain sur cinq a obtenu ce permis.

Pour sauver leur gagne-pain, les écrivains publics ambitionnent de s’unir comme un seul homme, pour s’acquitter de leur obligations judiciaires, mais aussi pour installer des kiosques afin d’échapper au vent et au soleil. Reste à savoir si ces mesures seront suffisantes pour garantir un avenir certain au métier. La tyrannie de la technologie est plus que jamais implacable.

 

Partagez

Commentaires